Du moyen âge à la Renaissance, de la Co-seigneurie à la surséance
Vers 1360, Perrin de Bauffremont, seigneur de Montdoré, partage ses terres entre ses quatre enfants.
A sa fille, mariée à Henri du Chatelet, sont attribués les terres de la rive droite du Côney, elles font partie du duché de Lorraine. A Gauthier, son fils, reviennent les terres de la rive gauche et le bourg actuel situés en Bourgogne. Modestes, les deux seigneuries, Lorraine et Comtoise, décident d’unir leurs moyens : nait ainsi une Co-Seigneurie, Lorraine et Comtoise, lieu de passage et d’échange propice aux affaires.
Les Comtois ont des alliances et des intérêts en Lorraine et inversement les Lorrains en Comté, à tel point qu’il fut impossible d’établir la frontière entre les deux duchés et Vauvillers entra en surséance-indépendance de fait à partir de 1477 et ceci pour plus de cent trente ans. Cette situation favorisa une indépendance juridique surprenante, on parle de “souverains de Vauvillers” possédant des droits régaliens : droit de haute justice, droit de battre monnaie. Cette même indépendance permet des taxes extrêmement faibles, favorise le commerce voire la contrebande.
Ainsi, la situation géographique et le statut politique aidant, on assiste à l’émergence d’une classe nouvelle de bourgeois, banquiers, marchands, fabricants, maîtres de forges et maîtres verriers. Ils exploitent les ressources naturelles du lieu. Ils peuvent vendre et exporter par terre et par voie fluviale.
Les halles, vieux marché en bois de la fin du XVIème, le presbytère, sa tour et ses fenêtres en meneaux, ancien hôtel de la monnaie, la maison avec oriel et portail sculpté d’Adam Sommier, commandant du château puis bailli, témoignent de cette ancienne prospérité.
Ce quartier ancien s’organise en demi-cercle autour de l’église actuelle.
La conquête française. Vauvillers duché prairie
Néanmoins être aux marches du royaume ne va pas sans risques. Vauvillers eu à subir différentes invasions venues de Lorraine et commanditées par les Rois de France, d’abord par Henri IV avec Tremblecourt (1595).
Déferlent ensuite les suédois à la solde de Richelieu (1636). Enfin Condé puis Turenne conquièrent définitivement la Comté (1678). La seigneurie de Vauvillers avec la famille Clermont-Tonnerre devient française. Par lettre patente de 1775, Louis XV étige les terres et marquisat de Vauvillers en “Duché-Prairie” de France en faveur de Gaspard de Clermont-Tonnerre : promotion brillante mais brève pour la modeste co-seigneurie des origines, dont il nous reste un remarquable ensemble du XVIIIème, le château, construit de 1715 à 1723 par Gaspard de Clermont Tonnerre.
Gaspard de Clermont Tonnerre – Le “bâtisseur”
Duc et pair de France, Gaspard de Clermont Tonnerre fut un militaire brillant et un administrateur rigoureux.
Il acquiert par rachat les terres Lorraines et devenu seul seigneur de Vauvillers il a le souci d’y asseoir son autorité et, à travers elle, l’autorité royale. Cette volonté s’inscrit fortement dans la pierre au château et à l’église : à la disposition ancienne “en bourg castral” autour de l’édifice religieux et des halles succède un ordre nouveau aux perspectives plus larges ; le regroupement aléatoire cède la place à la composition géométrique.
Et puis il y a eu 1789
La révolution Française marqua la fin de la seigneurie.
De toute la comté de Bourgogne, Vauvillers a été le plus touché par la Révolution. Il avait eu les faveurs de Louis XVI, s’était trouvé le plus à l’honneur, il a été le plus visé.
Des années s’écouleront, des siècles peut-on dire sans qu’il retrouve sa vigueur d’antan. Finie la vie de château et le prestige des Clermont-Tonnerre. Les grandes heures de Vauvillers sont passées ; meurtri, il rentre dans le rang.
Le château resta tristement sans vie durant plusieurs années jusqu’au 12 mai 1827, date à laquelle le conseil municipal sous la houlette du maire Isidore Doillon sollicite la réparation du château pour y loger les Gendarmes, la Justice de Paix, les maîtres et maîtresses d’école et les bureaux de la mairie. Eu égard à l’ampleur des travaux, les avis sont très partagés et durant plusieurs années, les membres du conseil hésitent entre la réparation du château et sa destruction. Ce n’est que le 10 mai 1830 que le principe de réparation du château est adopté. Les travaux se terminent en 1833 et la facture s’établit comme suit : Bâtiment principal 30273,80 F – Écurie 8841,50 F soit un total de 39115,30 F.
L’histoire de la France continuera, Vauvillers y prendra part, mais humblement. Beaucoup de jeunes gens s’inscriront dans les troupes napoléoniennes, un bon nombre de soldats mourront à Tilsit et pendant la retraite de Russie, mais aucun ne deviendra maréchal d’empire après Austerlitz ou Wagram.
Au village-même, les jours de marché sous les halles n’auront plus l’affluence d’avant ; les gens se dirigeront vers les villes plus achalandées. Les artisans verront disparaître leurs métiers : les dentellières ne seront plus assises devant leur porte, fuseau en main.
La deuxième partie du XIXème siècle sera paisible. Vauvillers ne fut pas touché par la révolution industrielle. Loin des matières premières et des voies de communication (ni voies navigables, ni voies ferrées), seuls le commerce du bois, le statut de chef-lieu de canton et l’artisanat, dont de nombreuses maisons de broderies, permettront à Vauvillers de garder un statut et une population enviable.
Vauvillers donnera à la IIIème république, un sénateur, Jules Hayaux et un député, Albert Mauguière (brodeur). Albert Mauguière sera député de 1928 à 1939. Les pleins pouvoirs du Maréchal Pétain stopperont net sa carrière politique.
L’après guerre se poursuivra calmement et dans la discrétion. Seules les batailles électorales épiques entre adversaires politiques de toujours, pimenteront la vie tranquille des Vauvillerois et Vauvilleroises.